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SKINJBIR
8 octobre 2007

Reinette l’Oranaise

Reinette Sultana Daoud est née à Tiaret. Son père est un rabbin d'origine marocaine et dans sa famille, qui a reçu la citoyenneté française accordée aux Juifs algériens par le décret Crémieux (1870), on parle arabe depuis des lustres.

A l'âge de deux ans, une variole mal guérie la laisse aveugle. A l'école des aveugles d'Alger, elle apprend le braille et... le cannage des chaises, mais sa mère n'a pas toléré qu'elle continue à faire ce travail qui lui abîmait les doigts: elle a voulu pour elle plus de gaîté et a demandé à Saoud l'Oranais de l'initier à la musique arabo- andalouse.

Du haut de ses treize ans, Reinette passe donc sa première audition. L'essai est concluant puisque le maître décrète "qu'on pourra en faire quelque chose '' et la prend en pension chez lui . Il en sort quelque temps plus tard un 78 tours, que plus tard Reinette ose à peine écouter "à cause des fautes de diction''.

Intégrée très vite à l'orchestre du maestro, elle en profite pour mémoriser les musiques et les paroles de centaines de chants. C'est aussi dans le Darb, vieux quartier juif d'Oran, qu'elle se familiarise avec les instruments de musique. Après la darbouka, elle s'initie à la mandoline puis au oud (luth arabe) qu'elle affectionne particulièrement.

 

En 1938, le maître Saoud Médioni émigre en France pour monter un café musical à Paris. Reinette, qui l'adorait sans le lui avoir jamais montré le rejoint dare-dare, mais elle est gentiment éconduite avec ces belles paroles'. ''Mademoiselle, vous avez plus besoin de moi ''.

 

Ce seront les derniers mots qu'elle entendra du maître vénéré qui mourra peu de temps après en déportation. Dans les années 40, Reinette quitte son Oranie natale pour Alger où à l'âge de 26 ans elle débute une carrière passionnante. Elle anime à radio- Alger deux soirées hebdomadaires et devient assez vite la chanteuse incontournable des fastueuses soirées altérasses.

 

Accompagnée des meilleurs musiciens comme Mustapha Skandrani (piano), Alilou (darbouka), Abdelghani (violon) elle chante avec les plus grandes voix de la chanson populaire et classique du Maghreb : Fadela dziria, Meriem Fekkaï, Alice Fitoussi, Zohra El-Fassia, Abdelkrim Dali, Dahmane Benachour.

 

Elle a même accompagné le maître du Chaâbi, Hadj M'Hamed El-Anka. Reinette exerce son art dans les nombreuses fêtes juives et musulmanes, mariages , circoncisions, anniversaires. Comme séfarade elle a même été admise à chanter dans un orchestre d 'hommes. Son nouveau maître de chant Abderrahmane Belhocine lui donne des cours d'arabe littéraire et lui fait travailler sa diction sans relâche.

 

Et puis le temps passe et avec lui les belles années faites de succès et de Cites. Durant la Guerre de Libération nationale, elle quitte, la mort dans l 'âme, sa terre natale et sa chaleur pour se replier dans la grisaille parisienne.

 

Commence alors une longue période de repli médiatique et de solitude. En 1985, Reinette a 70 ans et ne songe plus qu'à cultiver ses souvenirs. Il faut toute la ténacité d'un animateur de Radio-Beur à Paris pour la convaincre de remonter sur scène. Vit (en 1995) en banlieue parisienne, aux côtés de son mari, Georges Layani, un percussionniste.

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